Le charme d’ascétisme

(Résumé d'un article du professeur Constantin Delikonsantis dans l’ouvrage collectif :
« L’Orthodoxie comme proposition de la vie »)


1. La civilisation contemporaine entre contre-ascétisme et néo-ascétisme

L’auteur commence son article par l'observation que la civilisation contemporaine est eudémoniste et « consciemment anti-ascétique », puisque elle s’appuie : 1) au principe de la consommation, 2) au principe du capitalisme et 3) à la technocratie. Dans ce sens, malgré les différences parmi des civilisations, on peut parler d’une « civilisation mondiale actuelle », eudémoniste, économocratique et anti-ascétique.
Autrefois spiritualité et eudémonisme étaient des mesures contradictoires, la conviction dominante était qu’ « il faut donner du sang pour prendre de l’esprit » et que sans exercice et renoncement n’existe point de liberté. L’axe de l’éthique nouvelle, mondiale et sensualiste est l’identification de la liberté avec l’eudémonisme matériel, considérée en fonction de la quantité des besoins satisfaits. L’homme contemporain se qualifie comme « être possesseur » et non plus comme « être possesseur de logos », puisque logos, mesure, société et relations humaines sont sacrifiés à l’autel de l’envie et de la possession irraisonnables. L’homme moderne rejet le sens de la douleur, il diabolise et dénigre le moral du sacrifice et de la croix, c’est-à-dire l’ascèse, en la concernant comme une vie dehors des limites de la nature. Ainsi, ce qui était considéré par les grandes traditions des religions et par l'éthique comme compression et altération de l’homme, devient aujourd’hui fondement et sens de son existence.
C’est évident que l’eudémonisme nous enlève énormément plus qu’il nous donne, il nous transforme en esclaves, solitaires, angoissés, opprimés, catastrophiques, dépendants. La vie de l’homme moderne est, selon Fotios Contoglou, une vie « stérile … de toute chaleur du cœur », son âme est « âme morte, le refuge de la mort ».
A l’autre coté, et principalement à cause des problèmes dues à la consommation sans mesure et aux catastrophes écologiques, on voit un retournement des propositions ascétiques à consommer avec modération, pour que les générations suivantes et les plus pauvres puissent survivre sur le planète. Ce néo-ascétisme de notre civilisation postmoderne n’est pas vraiment d’une qualité ascétique, mais plutôt bénéficiaire; or, cette tendance est nettement un retour d’égoïsme matérialiste et son objectif est de garantir et prolonger l’eudémonisme actuel. Donc, même si tous les mouvements ascétiques actuels tirent ses idées depuis les grandes traditions religieuses et philosophiques, ils ne suivent pas le principe de la libération et du perfectionnement de l’homme, mais ils sont au servis de l’eudémonisme. 
Néanmoins, l’ascèse est liée avec la nature humaine. L’home, selon Max Scheler, est « l’ascète de la vie », il peut nier la réalité, alors que les animaux en ne peuvent pas. Si les animaux ont l’instinct qui règle leurs besoins, l’homme, qui est libre, doit limiter ses envies, et c’est un élément totalement nécessaire de sa vie. Ascèse ou chaos ? Voilà la question radicale en face de l’home.


2. Le sens de l’ascèse chrétienne

Si l'ascèse signifie négation dualiste du monde, de la vie, du corps et de la joie, alors le Christianisme n’est pas ascétique. Les auteurs du Nouveau Testament n’ont pas utilisé le mot « ascèse », probablement parce qu’il existait dans le langage philosophique dualiste. Clemens d’Alexandrie et Origène introduirent ce terme dans le langage théologique considéré comme excès de soi même, comme abandon de la volonté individuelle et comme modestie. Dans ce sens, le Christianisme est exclusivement et seulement ascétique. Le fondement le la vie ascétique dans l’Eglise est l’exhortation du Christ : « si quelqu’un veut venir après moi, qui se renie lui-même et qu’il porte sa croix et me suive » (Math. 16,24). De cette façon l’ascèse ne sert pas l’eudémonisme mondain, comme en fait le néo-ascétisme, mais elle est l’avant-goût de l’éternité, de la « vie véritable » et de la liberté. L’ascèse Orthodoxe est la source du Salut, la dynamique de la vie en Christ, « l’expérience et l’expression de la vie chrétienne-ecclésiale, commune pour tous le croyants, clercs, moines et laïcs, hommes et femmes ». La synopsis de l’ascèse est la modestie ; par conséquence, les humbles et les repentants sont des personnes ascétiques.
L’ascèse Orthodoxe n’est pas une oppression de la nature humaine ou un masochisme ; c’est pourquoi il n’a aucune relation avec l’abattement et la dépression. L’Orthodoxie est lumière et joie, communion contre l’abandon, eucharistie et vie. Le moral ascétique est lié avec la participation à la vie de l’Eglise, avec la Sainte Eucharistie, qui est la plus profonde acceptation de la création. Dans cette dimension, l’homme parait comme le ménager et le prêtre de la création, celui qui l’offre au Dieu Créateur. De ce fait, l’écologie prend un nouveau sens, ce du respect de la création comme don de Dieu, et par conséquence de la responsabilité dans la gestion de ce don. La contribution de la tradition ascétique des orthodoxes est remarquable, puisqu’elle propose la modération et l’autarcie, le jeune et la dépossession en opposant à l’avidité, à la consommation et à l’eudémonisme. 


3. Ascèse chrétienne et ascèse philosophique

L’ascèse constitue une orientation de la vie vers la vérité. De ce fait, elle a des partisans dans l’histoire de la philosophie, puisque la philosophie est la recherche de la vérité. Pour les philosophes de l’antiquité l’ascèse est la voie vers la liberté. Diogène a été ébahi en regardant un enfant qui, dans sa simplicité, avait bu le l’eau en utilisant sa main ; il a considéré l’enfant plus libre que lui, et il a cassé la tasse qu’il utilisait jusqu’à ce moment-là.
L’ascétisme du philosophe est frappant ; il a des points communs avec ce du christianisme : opposition aux conventions sociales, à l’eudémonisme et à la passivité, et affranchissement par les choses qui asservissent l’homme. Néanmoins, il y a une grande différence : la liberté du philosophe est arrogante, agressive, auto-salvatrice, individuelle, autonome, tandis que la liberté du chrétien est crucifiée et l’ « Ego autonome » constitue une altération profonde. L’ascèse philosophique souvent finit au cynisme, à l’indifférence pour le monde. Il est évident que l’ascèse sans modestie et eucharistie conduit à l’analgésie et au rigueur. La liberté absolue conduit le philosophe à perdre chaque joie, chaque plaisir, chaque intérêt. La croix volontaire du chrétien le conduit à la Résurrection, à la joie véritable et infinie. En plus, la vertu du philosophe est un perfectionnement individuel, son ascétisme est égocentrique, tandis que l’ascèse chrétienne est la participation à une manière de vivre en communion ecclésiale, et se nourrit par les sacrements de l’Eglise et surtout par l’Eucharistie.


4. Est-ce véritable la critique de Nietzsche contre l’ascèse chrétienne ?

Nietzsche récapitule dans ses œuvres toutes les critiques des philosophes contre l’éthique et l’ascétisme chrétiens. Il supporte que le Christianisme, dont il qualifie comme « Platonisme pour le peuple », ait empoisonné l’amour et la joie et, puisque l’amour n’est pas mort, il s’est abâtardi en pécher. Le philosophe ici présuppose que dans le christianisme coexistent des tendances dualismes, telles que de Platon et de Plotin, haine contre le corps, mépris de la joie, lâcheté d’accepter la vie.
Dans la philosophie de Platon le corps est le « tombeau » de l’âme. Egalement, Plotin avait honte parce qu’il avait corps et il considérait la rédemption hors du corps, comme la libération du corps. Dans le Christianisme domine un esprit différent : le corps est « temple » de l’Esprit Saint (1 Cor. 6,19) et la théologie patristique déclare unanimement l’unité de l'âme et du corps de l’homme. Corps et matière n’ont aucune relation avec le mal. Par contre, c’est l’intellect humain, quand il pense contre la volonté du Dieu, qui rend charnels l’âme et le corps. L’ascèse orthodoxe se retourne contre les passions et pas contre le corps ; ainsi, les tendances d’animosité contre le corps, se sont les altérations de la véritable tradition chrétienne.
Nietzsche blâme aussi les chrétiens qu’ils cherchent des soutiens moraux et d’abri dans les vertus des faibles : l’amour, la pitié, la miséricorde, la solidarité, l’égalité, et également au monde idéal et au-delà. Pourtant, sa critique ne touche pas la vertu chrétienne authentique, mais quelques exagérations de la pratique ascétique, notamment à l’occident. Dans la tradition Orthodoxe l’ascèse est force de la vie, vertu et courage, elle est la recherche de l’ « amour parfait ». Abbas Agathon disait : « s’il était possible à moi, trouver un lépreux et lui donner mon corps et prendre le sien, je le faisais avec plaisir ; car c’est l’amour parfait ».
Il est très important que tous ces blâmes de Nietzsche, la Théologie Orthodoxe les répète contre la tradition théologique et philosophique de l’occident, où l’ascèse chrétienne souvent restait scolastique et se conformait aux règles rigoureux du comportement extérieur. A cause de ça, le Protestantisme a rejeté le monachisme, en produisant le puritanisme et l’ « ascèse mondaine » qui sert à l’auto-confirmation religieuse individualiste. En général, le détachement de la vie ecclésiale et l’objectivisme constituent la pathologie de la spiritualité occidentale.

5. Epilogue

Toujours l’ascétisme et les ascètes étaient vus avec admiration, même parmi les penseurs athées. L’anthropologue Arnold Gehlen considère l’ascèse, malgré les progrès à la recherche de la nature humaine, comme un phénomène « obscur », « énigmatique », et « mystérieuse » qui « dans toutes les époques a provoqué l’admiration ».
La tradition Orthodoxe a donné à l’ascèse « mystérieuse » le caractère du « mystère » et elle l’a attaché avec la vérité de la personne, de la liberté et de l’amour, c'est-à-dire avec la manière de vivre dans l'Eglise. L' Ascétisme est le Christianisme tout entier. De ce fait, un Christianisme non-ascétique serrait une parodie du Christianisme.



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